Le projet « Graines de penseurs » s’enracine dans un constat : les élèves sont confrontés très jeunes à une multitude de préjugés concernant la couleur de peau, le genre, la religion, l’extraction sociale ou encore l’orientation sexuelle. Qu’ils en soient la cible ou qu’ils les véhiculent à leur insu, ces préjugés structurent leur expérience et parasitent leur rapport aux autres, au monde et à eux-mêmes, comme un filtre déformant aux conséquences aussi néfastes que durables. Ils sont omniprésents, et pourtant, peu discutés. Ce non-dit favorise la prolifération des préjugés : ceux qui les subissent ont généralement honte d’en parler ou ne possèdent pas les mots pour le faire, tandis que ceux qui les colportent n’ont souvent pas conscience de la gravité et des implications de leurs discours.
C’est pour armer les élèves contre les conséquences douloureuses des préjugés que « Graines de penseurs » est né. Ce partenariat entre l’association Tête-à-Texte, qui promeut la diffusion de l’esprit critique et des savoirs par l’accès aux textes pour tous, et un groupe d’enseignants volontaires de la cité scolaire Français Villon et de l’école élémentaire Alain Fournier a pour objectif d’arracher les préjugés à la sphère nocive du non-dit en aidant les élèves à mettre des mots dessus. Tout au long de l’année scolaire, des ateliers mensuels réunissant plusieurs groupes d’âges (un groupe pour les CM1, CM2 et, 6 e, un groupe pour les 3 e et 2 nde, et un groupe de volontaires) sont organisés, au cours desquels deux membres de l’association interviennent simultanément pour accompagner les élèves dans leurs discussions. Les débats abordent les préjugés sous toutes leurs formes, selon des modalités adaptées à chaque classe d’âge, en faisant appel à l’expérience des élèves pour les aider à affronter ce sujet difficile dans les meilleures conditions. Ces ateliers font l’objet en classe, avec les enseignants impliqués dans le projet, d’une préparation en amont ainsi que d’un prolongement par la suite qui s’inscrivent dans un travail sur des œuvres et des notions au programme. Les parents, dont l’implication à ce projet s’avère précieuse, sont conviés à la fin de l’année à une table ronde où des élèves présentent le fruit de ce travail commun, qui s’achève, dans un esprit chaleureux et platonicien, sur un banquet participatif.